Comment le tabou des règles impacte l’éducation des filles ?
En Éthiopie, seulement la moitié des filles savent ce que sont les règles avant de les avoir pour la première fois, selon un sondage réalisé par l’UNICEF.
Dans le monde, des millions de filles manquent l’école ou l’abandonnent complètement, simplement parce qu’elles ont leurs règles. En cause ? Le manque d’accès à des infrastructures adaptées au sein des établissements scolaires et la peur de subir des moqueries.
Le tabou des règles n’est alors pas qu’un problème culturel, il menace concrètement le droit fondamental des filles à aller à l’école et à se construire un avenir.
Pourquoi les règles restent un tabou dans de nombreux pays
Dans de nombreux contextes culturels et régions du monde, les règles sont un tabou que l’on peine à rompre entre les générations. On apprend aux filles à se cacher, à ne jamais parler de leurs règles à la maison, encore moins à l’école.
Ce silence a des conséquences directes : la majorité des filles n’ont pas d’informations sur ce qui leur arrive au moment de la puberté. À cause du tabou des règles, beaucoup vivent leurs premières menstruations comme un traumatisme : elles ne comprennent pas ce qui arrive à leur corps, ignorent comment gérer les saignements et se retrouvent isolées. Selon une étude réalisée en Éthiopie et relayée par l’UNICEF, moins de la moitié des filles interrogées savaient ce qu’étaient les règles avant leur première fois.
Dans certains contextes, il existe même des croyances selon lesquelles une fille réglée serait impure ou source de malheurs, allant jusqu’à lui interdire l’accès à certaines parties de la maison ou à certaines activités. Ainsi, le tabou des règles empêche les jeunes filles de vivre pleinement et menace leurs droits.
Les conséquences concrètes sur l’éducation des filles
L’absence d’informations, d’accompagnement et de soutien a un impact direct sur l’éducation des filles dont la fréquentation scolaire chute particulièrement lors de l’adolescence.
Selon l’UNICEF :
- Près de 4 jeunes filles sur 10 dans le monde ne terminent pas le lycée.
- En Asie du Sud, les filles entre 15 et 19 ans ont trois fois plus de risques que les garçons de ne pas être inscrites à l’école.
Les filles qui manquent plusieurs jours par mois accumulent du retard tout au long de l’année et finissent par rater leurs examens. Souvent découragées par la situation, elles subissent en plus les moqueries des garçons et abandonnent les bancs de l’école.
Les conséquences ne s’arrêtent pas là. Dans les contextes les plus précaires, les familles peuvent choisir de retirer complètement leur fille de l’école dès les premières règles, notamment parce que cela représente, pour elles, le passage à l’âge adulte, mais aussi pour leur éviter la stigmatisation. Ces adolescentes se retrouvent alors plus exposées aux mariages forcés ou au travail domestique : le tabou des règles devient ainsi l’une des causes qui alimente les inégalités de genre.
Le manque d’infrastructures : un autre frein majeur
Au-delà du tabou des règles, le manque de produits hygiéniques et d’infrastructures scolaires adaptées à l’hygiène menstruelle compliquent l’accès à l’école pour les jeunes filles. Beaucoup d’écoles dans le monde, notamment en zones rurales ou au sein de quartiers défavorisés, ne disposent pas de toilettes séparées et sures pour les filles. Sans portes, sans eau courante, ni savon, les filles n’ont aucun moyen de se changer discrètement et de manière sécurisée.
Selon l’UNICEF :
- Deux écoles sur cinq, soit 39 % des établissements scolaires, donnent des cours d’éducation à la santé menstruelle dans le monde.
- Seulement 31 % des écoles dans le monde mettent des poubelles à disposition dans les toilettes des filles, avec un taux de 17 % dans les pays les moins développés.
- En Afrique subsaharienne, seule une école sur huit met à disposition des produits d’hygiène pour les filles.
Cette absence d’infrastructures adaptées exacerbe la précarité menstruelle : quand elles ont leurs règles, les filles préfèrent rentrer chez elles pour se changer, faute de quoi elles risquent d’affronter la honte d’une tâche de sang. Parfois, elles n’ont même pas de quoi se protéger, utilisant des morceaux de tissu, peu hygiéniques et souvent cause d’infections.
Glory, 13 ans, vit à Endabash, en Tanzanie, où les filles font face à d’importants obstacles à l’école, notamment pendant leurs règles. Dans son école, les toilettes ont longtemps été privées de portes et d’eau, sans lieu pour jeter les protections, ce qui exposait les filles à de possibles infections et aux regards des garçons. La jeune fille raconte : « La période des règles était stressante, on avait peur que la jupe soit tachée et encore plus peur que les garçons se moquent de nous. »
Beaucoup, comme Glory, devaient manquer l’école plusieurs jours chaque mois, ce qui explique pourquoi seule 1 fille sur 4 terminait sa scolarité. Avant la mise en place du programme de développement par World Vision, plus de 30% des adolescents de 14 à 17 ans n’étaient pas scolarisés.
Grâce au parrainage, l’école a bénéficié de nouvelles classes et de blocs sanitaires adaptés, désormais équipés d’eau et de portes. À présent, Glory et ses camarades peuvent suivre leur scolarité avec plus de sérénité et de sécurité. « Notre école ressemble enfin à une vraie école, comme celles que je ne voyais qu’en photo. Maintenant, je peux aller en classe chaque jour. »
Briser le tabou : quelles solutions ?
Des solutions existent pour briser le tabou des règles, à commencer par des actions de sensibilisation auprès de la population, auprès des filles bien sûr, mais aussi des garçons. Parler ouvertement de la menstruation, la dédramatiser, informer les adolescentes sur leur santé reproductive : autant de clés pour permettre aux jeunes filles de mieux gérer leurs règles, de reprendre confiance, et de rester à l’école.
Grâce à ses programmes de parrainage, World Vision enseignent aux jeunes les bases de l’anatomie, de la puberté et du cycle menstruel. Ces derniers comprennent alors que les règles sont un phénomène naturel et découvrent les moyens de les gérer.
Les adolescents apprennent en effet à confectionner des serviettes hygiéniques réutilisables. Au sein des ateliers mis en place dans le village de Glory, en Tanzanie, les jeunes produisent des dizaines de protections chaque mois et attirent autant les filles que les garçons. Ces protections allègent ainsi le poids financier que représentent les produits hygiéniques au sein des familles.
Les actions de l’ONG humanitaire, à l’image de l’histoire de Glory, permettent également la rénovation ou la construction de toilettes adaptées, avec un accès à l’eau, des portes et des équipements pour jeter les serviettes jetables. Ces nouvelles installations représentent plus qu’un confort pour les élèves, elles leur assurent une sécurité et la possibilité de poursuivre leurs études.
Un combat pour la dignité et l’égalité
Avoir ses règles ne doit jamais être un obstacle à l’éducation. Lutter contre le tabou des règles, c’est rendre l’école accessible à toutes et défendre le droit fondamental de chaque fille à fréquenter l’école pour choisir son avenir.
Chacun peut agir à son niveau. En devenant parrain ou marraine, vous pouvez ainsi accompagner une jeune fille et son entourage vers une société plus juste. À hauteur de 30€ par mois, le parrainage finance de nombreuses actions pour améliorer l’accès à l’éducation auprès des populations les plus vulnérables.
C’est notamment l’objectif de la campagne « 1000 filles » portée par World Vision : pour que plus jamais une fille ne doive choisir entre sa scolarité et sa sécurité en raison de ses règles.
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